Interview

Ruth Cohen une galeriste pas comme les autres (2/2)

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A suivre, la 2ème partie de l’interview de Ruth Cohen, une galeriste pas comme les autres qui a décidé de faire entrer l’art dans l’entreprise avec sa galerie Ruth Gallery.

Alors comment s’est déroulé l’accompagnement ?

Cet accompagnement m’a beaucoup aidée dans l’élaboration de mon projet, j’ai eu un excellent coach qui a su me pousser dans mes retranchements. Il a relevé les faiblesses de mes projections, m’a forcée à rechercher toutes les solutions possibles afin que mon entreprise soit pérenne. Je remercie la chambre du commerce qui m’a mise en valeur en me dédiant trois pages dans son magazine, ce qui m’a permis d’être contactée par d’autres journalistes.

C’est d’ailleurs lui qui m’a encouragée à faire un test auprès d’une entreprise afin d’avoir un retour sur mon offre. Puis je me suis souvenue que j’avais un jour vaguement dit à un CEO que je songeais à me reconvertir dans l’art et il m’avait répondu de venir le voir quand je le ferais. Je suis donc partie au rendez-vous en quête d’un avis et avec l’espérance de pouvoir peut-être louer un ou deux tableaux.

Ruth Cohen une galeriste pas comme les autres (2/2)

Ruth Gallery

Lorsque je suis arrivée, j’ai été très surprise d’être accueillie par son équipe de direction, et là j’ai compris qu’il ne s’agissait plus d’un test, il fallait vendre. Tout n’était pas au point dans mon offre, mais je suis partie avec une commande d’une vingtaine de tableaux à louer d’un budget approximatif de 3000 euros par mois. Puis sans prospecter, par le biais des médias, j’ai eu d’autres clients, là il fallait ralentir la cadence, car je n’avais même pas fini de monter ma société et j’avais déjà peur de ne pas pouvoir suivre.

Comment s’est passé votre lancement ?

Bien, j’ai commencé par louer un bureau dans un espace de coworking, mais je me suis rendu compte au bout de cinq mois qu’il me fallait quand même un espace d’accrochage. Le problème, c’est qu’il fallait que je limite au maximum les dépenses (sic mon mari) et j’ai remarqué que dans ce même espace, il y avait une zone en chantier non exploitée. J’ai donc contacté le responsable. Nous avons conclu un marché, je faisais certains travaux et cet emplacement de 100 m2 était à ma disposition gratuitement. C’est comme ça que j’ai eu ma première galerie.  

Première galerie ?

Oui, la première, j’ai changé d’adresse depuis. Comme j’étais très active sur les réseaux sociaux et que je me servais de mon carnet d’adresses hérité de ma carrière dans la finance pour cibler mes clients, j’ai un jour été contactée par le Casino 2000, le plus grand casino du Luxembourg. Ils avaient beaucoup aimé mon enthousiasme. Et de fil en aiguille, j’ai fini par m’installer chez eux et j’ai une galerie de 300 m2.

Vous ne vendez qu’aux entreprises

Non, comme je suis Ruth Gallery, j’organise comme toute galerie et je participe aussi à des événements. J’ai une anecdote concernant ma première participation à la foire de Mulhouse. Au début on se moquait de moi, car je ne savais pas accrocher mes tableaux, mais au final j’ai été la seule galerie à vendre…

Ruth Cohen une galeriste pas comme les autres (2/2)

Ruth Gallery

Dès que je suis rentrée au Luxembourg, j’ai tout de suite voulu renouveler l’expérience dans une autre foire et j’ai demandé à avoir le plus grand stand à l’entrée. Et grâce à mes talents de négociation, j’ai même réussi à occuper plusieurs espaces, ce qui fait que l’on me voyait partout, et j’ai très bien vendu. À ce moment-là, rien ne m’arrêtait, je poussais tout le monde, j’étais une vraie tempête.

Là vous ne parlez que de succès, mais avez-vous eu des difficultés ?

La vraie difficulté a été de m’imposer comme galeriste, car la location a été très facile pour moi. C’était différent lorsque je faisais un vernissage, les vrais collectionneurs ne venaient pas. J’ai essayé de comprendre pourquoi. Je pense qu’ils ont du mal à faire confiance à une jeune galerie et comme je refuse d’être cloisonnée dans un seul style, ils ont sans doute des difficultés à s’y retrouver, bien que je ne mélange pas les styles lorsque je fais une exposition. 

Le problème, c’est que je suis amoureuse du Pop Art, j’aime beaucoup les artistes vietnamiens que je trouve apaisants. Et depuis peu, je mets à l’honneur l’art contemporain africain. C’est d’ailleurs le CEO de Casino 2000 qui m’a suggéré d’intégrer l’art africain contemporain à mon catalogue. Et quand j’ai commencé à faire des recherches, je suis tombée des nues. Ils sont très talentueux et l’Afrique, notamment le Cameroun, est la destination qui retient en ce moment l’attention de tous les collectionneurs. 

Dans ma conception, le rôle d’une galerie d’art est de dénicher des talents et de faire découvrir des artistes.

Ruth Cohen une galeriste pas comme les autres (2/2)

Ruth Gallery

Quelle est votre vision de l’art ?

Pour moi, acheter des œuvres d’art, c’est d’abord se faire plaisir, et une fois que l’on a une belle collection, on peut penser sérieusement à investir. D’ailleurs, je pense que les collectionneurs sont avant tout des passionnés. Il faut prendre le temps de discuter avec l’artiste pour découvrir comment il crée. Et même si maintenant j’ai une galerie, je continue à en acheter pour moi. J’ai appris à être raisonnable, bien qu’il m’arrive parfois d’être dans l’incapacité de vendre une œuvre que je devrais normalement vendre dans la galerie. Heureusement que j’ai encore beaucoup de projets à mettre en place pour assouvir ma passion.

Un conseil pour quelqu’un qui voudrait se lancer ?

Avant tout, ne pas se limiter soi-même. On trouvera toujours des raisons de pourquoi ne pas le faire. Si on a envie de faire quelque chose, il faut le faire bien. Un autre point à ne pas négliger, c’est de s’assurer d’avoir assez de trésorerie pour mener à bien son projet. Covid ou pas, il faut s’adapter et avancer. Même quand des personnes ont eu un comportement désobligeant envers moi, j’essaie avant tout de comprendre pourquoi elles ont essayé de m’humilier. C’est d’ailleurs grâce à cela que l’idée des soirées de l’art est arrivée.

Racontez-nous l’histoire des soirée de l’art

Un directeur de banque m’avait contactée, car il aimait bien mon idée et sa banque sponsorisait des événements culturels. Il m’a donné un agenda et suggéré des endroits, persuadé que je n’y arriverais pas. Dans mon jardin deux jours plus tard, lorsque j’en discutais au téléphone, mon voisin m’a interpellée en me disant que c’était son meilleur ami qui gérait les salles et au final je n’ai eu que l’embarras du choix.

Ruth Cohen une galeriste pas comme les autres (2/2)

Ruth Gallery

C’est donc confiante qu’une semaine plus tard, j’ai repris contact avec le responsable de la banque et nous avons fixé un rendez-vous. Une entrevue qu’il décommandera cinq minutes avant par SMS en prétextant ne pas être au bureau, sauf que sa secrétaire n’était pas au courant de cette annulation. Elle m’a installée dans la salle de meeting pendant qu’elle allait le chercher et est revenue en essayant de trouver une excuse pour dissiper le malaise.

Mais je ne me suis pas laissé abattre, j’ai repris tous ses bons conseils et créé mes propres soirées. Cela a été un franc succès la première année alors que je sortais de nulle part. Et aujourd’hui, lorsque je le croise dans des événements, il n’ose pas me regarder dans les yeux.

Donc il ne faut surtout pas s’arrêter à ses origines ethniques ou sociales et ne pas hésiter à se lancer en se rappelant l’exemple de nos aînés bamilékés, ils ont très bien réussi en s’appuyant simplement sur leur bon sens et leur envie de réussir.

Pour suivre l’actualité de la galerie, rendez-vous sur le site de Ruth Gallery.

www.valerie-lachavanne.coach

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